Décharge du Bouquis - une bombe à retardement Imprimer
Écrit par Michel GAUCHER   
Vendredi, 01 Avril 2011 16:08

MG/DEA Mars 2011

Lettre de DEA à la Préfecture en date du 14 mars 2011

Monsieur le Préfet,

Parmi toutes les atteintes à l’environnement que DEA combat à Dardilly, il en est une en sommeil qui est pourtant une bombe à retardement : il s’agit de la décharge du Bouquis située près de la RN6 à Dardilly.

Pour mémoire, ce sont 300.000 à 1.000.000 (selon les sources) de fûts de 200 litres qui ont été entreposés entre 1975 et 1980 sur près de 4 ha dans une carrière d’argile désaffectée.  A l’origine l’autorisation avait été donnée pour des résidus pétroliers, mais en réalité la provenance d’une grande partie de ces fûts est indéterminée (France et étranger) et on ignore ce qu’ils contiennent.  Ces fûts, qui n’étaient sûrement pas en très bon état à leur arrivée sur site, ont été entassés en vrac sur plusieurs mètres de haut.  De 1980 à 1989 ils ont été recouverts de remblais sur une hauteur variable de 10 à 20 mètres.
En admettant un chiffre de 500.000 fûts, il y a  100 millions de litres, soit 100.000 m3 de déchets ultimes, tous plus polluants les uns que les autres, en attente de se déverser dans le sol.  Ce n’est qu’une question de temps car les fûts ne tiendront pas éternellement sous le double effet de la corrosion et de la pression.
Des analyses du sol effectuées en 2008 à la périphérie du site (sans toucher aux fûts)  ont montré des taux de concentration élevés de dioxine, furane, arsenic, cadmium, cuivre, mercure, plomb, etc…  Pour le cadmium par exemple le taux de concentration relevé était 22 fois supérieur au maxi autorisé.  Cela montre déjà que le sol est fortement pollué alentour soit par ruissellement des eaux superficielles, soit par capillarité des eaux de fond.
Si la périphérie de la décharge est autant contaminée, que dire du centre où sont entassés les fûts !
Or la décharge est traversée par une source qui vient du Paillet en amont.  Cette eau et les précipitations, chargées des produits issus de la décharge, se sont d’abord écoulées dans le ruisseau voisin.
Au cours des années 80, une pompe de relevage a été installée en bas du site renvoyant les lixiviats de la décharge dans l’égout public au Paillet.  S’en sont suivi pendant des années de multiples plaintes (particuliers et comité de défense) tout au long du tracé de l’égout pour de mauvaises odeurs et des problèmes anormaux de santé.
La solution de rejet à l’égout étant à l’évidence insalubre, en 1991 une petite station de traitement a été installée en sortie de décharge.  Les eaux, traitées uniquement par passage sur des charbons actifs, ont alors été renvoyées directement à la station d’épuration commune située en contrebas dans le vallon et dont les effluents finissent dans le ruisseau le Sémanet.

Depuis 1992 DEA a alerté sur les faiblesses du système en dénonçant les multiples dangers pour l’environnement.
•    Des eaux polluées continuent à s’écouler dans le petit ruisseau voisin, directement et via le fossé situé en bordure opposée de la décharge.
•    Le fond de la décharge ne pouvant pas être étanche à 100% la nappe phréatique reçoit forcément des produits polluants.
•    Le traitement des lixiviats parvenant à la petite station,  n’étant destiné qu’à relever le pH et à isoler des matières flottantes, n’est pas adapté pour traiter des polluants indéterminés.
•    Les liquides entrant et sortant de cette station, observés par DEA, ont des couleurs, des odeurs et des consistances très variables dans le temps.
•    Même les charbons ont été des mois sans être remplacés montrant des carences dans la gestion de la station, ajoutant à son manque d’efficacité.
•    L’ADEME, qui depuis 1994 a en charge la gestion de la station, a affirmé en 2007 que les résultats de ses analyses (lesquelles, où et quand ?) étaient conformes aux objectifs de traitement des rejets de lixiviats.
•    Comment croire qu’il y avait autant de polluants recensés en 2008 à la périphérie du site avec des concentrations cancérigènes et qu’il n’y a rien d’anormal dans les lixiviats du fond de la décharge qui finissent dans le Sémanet, la station d’épuration étant incapable de les dépolluer.  
Ceci est l’état actuel et il est déjà pour le moins préoccupant pour DEA… mais pas pour Madame le Maire de Dardilly qui a refusé d’inscrire la décharge du Bouquis dans le PPR de la commune au prétexte que l’ADEME gérait la situation. Les démêlés judiciaires peuvent-ils expliquer en partie cette prise de position  alors que la dangerosité de cette décharge aurait peut-être mériter un classement Seveso ?

Mais le passé et le présent étant ce qu’ils sont, c’est pour l’avenir proche que DEA s’inquiète tout particulièrement car dans moins d’un an la station d’épuration du Sémanet sera remplacée par une station de relevage qui renverra les lixiviats du Bouquis avec les eaux usées domestiques à Pierre Bénite via le réseau d’égouts communautaire.
Concrètement la canalisation de refoulement venant du relevage passera sous la voie ferrée et la RN6, puis remontera le chemin du Four à Chaux et se déversera dans le réseau gravitaire route de Limonest.
DEA se réjouit de voir ainsi éviter à l’avenir l’un des risques de pollution majeure du Sémanet (il restera cependant les eaux superficielles drainées par le ruisseau venant de la décharge), mais le problème se retrouve reporté dans Dardilly et en aval sur le tracé de l’égout.
Ainsi les lixiviats chargés de polluants inconnus, en quantités indéterminées se retrouveront rejetés directement à l’égout public sans possibilité d’analyses préalables pour en déterminer la dangerosité, nous ramenant à la situation des années 80 en pire.

DEA voit dans ce qui se prépare de multiples manquements ou infractions et en particulier :
1.    Au Code de l’Environnement et aux règles ICPE (que la décharge en elle-même ne respecte déjà pas) avec un rejet à l’égout d’eaux polluées sans analyses en continu  avant rejet et sans bassin de confinement  en cas d’anomalie. Le prochain rejet de déchets ultimes au réseau d’égout public traversant Dardilly constitue une modification substantielle qui devrait impliquer a priori une nouvelle étude d’impact, voire une étude de dangers.
2.    Au code de Santé Publique en acceptant dans le réseau communautaire des eaux industrielles polluées et potentiellement dangereuses pour la santé  avec tous les produits déjà recensés plus ceux qu’on ignore.
3.    Au Code Général des Collectivités Territoriales avec une atteinte certaine à la salubrité, voire une mise en danger de la vie d’autrui, avec en particulier des matières cancérigènes mélangées aux eaux usées.

C’est pour toutes ces raisons que DEA demande de prendre les mesures qui semblent devoir s’imposer compte tenu des dangers et des inconvénients pour le voisinage, pour la santé, la sécurité et la salubrité publiques, sans oublier l’environnement avec les écoulements non contrôlés dans le milieu naturel.

Je reste à votre disposition pour les suites données à notre requête.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Préfet, mes respectueuses salutations.


Michel Gaucher
Président de DEA